Ysambre, un univers de féerie végétale, mais pas que !

Parlons d’Ysambre
Il est des livres qu’il est difficile de présenter, dont il est difficile de parler – non pas qu’il y ait peu à en dire – , mais tant ils sont tout. Non pas un Tout, mais tout, simplement tout. Ysambre est de ceux-là.
Beaucoup de choses ont été dites et écrites sur le diptyque Ysambre et pourtant peu nombreux sont ceux qui rendent hommage à sa richesse. Bien plus qu’un simple livre, Ysambre a été, tour à tour, qualifié de livre-objet, de livre-univers, de livre-promenade… C’est tout cela à la fois et bien plus encore !

Ysambre : du livre objet au livre univers

Au premier abord, Ysambre est un magnifique ouvrage : livre objet, objet d’art, livre promenade, livre univers… Les qualificatifs ne manquent pas pour décrire ces magnifiques albums qui tirent leur originalité d’un maquettage audacieux, qui alterne des pages de papier calque et de papier à dessins. Le second volume (Ysambre, la Femme Graine) comporte même une couverture découpée qui participe à faire de ce beau livre un splendide livre-objet.

Ysambre, le Monde-Arbre un livre objet

Ysambre, le Monde-Arbre un livre objet

Dès les premières pages, le lecteur découvre un livre promenade. Les carnets de voyages de Nimh, puis d’Alcyde et de Salliah sur les chemins de la forêt d’Ysambre. Happé par les illustrations autant que par l’intrigue, le lecteur se transforme en spectateur d’un univers entre féerie et science-fiction. Au fil des pages, il devient le témoin du bouleversement mécanique qui menace le fragile/subtile équilibre d’Ysambre. Puis il se surprend à devenir le complice de la quête pour sa sauvegarde.

Issu du travail commun de Mickël Ivorra et Séverine Pineaux, Ysambre est bien plus qu’un livre collaboratif. C’est presque un travail symbiotique qui a été réalisé, tant il est impossible de distinguer le texte de l’image. Mickaël a développé une histoire qui intégrait des tableaux existants et j’ai ensuite réalisé les dessins complémentaires nécessités par la narration. (1)

Le résultat de cette fusion entre textes et images, entre science et féerie, entre tradition et modernité s’incarne dans un livre univers à mi-chemin entre la fable onirique et le conte initiatique.

Ysambre, un univers étrangement familier

Mickaël Ivorra et Séverine Pineaux ont créé un véritable univers qui n’est pas sans rappeler celui crée par JRR Tolkien pour son Seigneur des Anneaux. Avec sa géographie, ses peuples, ses codes et ses règles.

Ysambre, la Femme Graine un livre steampunk

Ysambre, la Femme Graine un livre steampunk

Ysambre dévoile un monde complexe aux préoccupations étrangement familières.

La forêt primordiale…
Le Vieux Bois…
Ysambre…

Berceau de l’humanité, elle est la mythique forêt magique.

Forêt vivante et personnifiée, Ysambre est une et multiple à la fois. Comme l’océan n’existe que par les gouttes d’eau qui le compose, Ysambre existe à travers les esprits de la nature qui la composent. Un univers où faune et flore se confondent. Ysambre symbolise l’équilibre entre le monde végétal et le monde animal, un équilibre fragile…
Parmi les créatures fantastiques qu’abrite la mystérieuse Ysambre, il est un peuple féerique qui incarnent particulièrement cet équilibre subtile : les Sylphes. Sortes de dryades, ces créatures mi-humaines, mi-végétales, sont victimes d’une étrange maladie.
Mais Ysambre est aussi un univers sombre…
A l’instar des Arbres Faÿs qui protègent les amours enchantées mais savent se défendre des attaques des êtres humains (2), Ysambre sait se défendre de ses agresseurs : Là où le sang de Salliah s’était écoulé, la Terre se souleva brusquement (…), en un éclair, le Chasseur fut littéralement avalé par les bois, comme s’il n’avait jamais existé. (3)

Puisant aux sources des mythologies celtes et germaniques, s’appuyant sur les plus anciennes légendes passées dans l’imaginaire collectif, et abordant des problématiques résolument modernes, Mickaël Ivorra et Séverine Pineaux ont su créer un univers qui, bien que fantastique, nous est familier. Ysambre est un peu notre origine et notre futur à la fois. Tel l’Ouroboros, Ysambre symbolise le cycle éternel de la naissance, de la mort et du renouveau.

Ysambre : notre futur ?

Tandis que Nimh, puis Alcyde et Salliah partent combattre le mal qui ronge Ysambre ; nous découvrons l’horreur d’un univers mis en péril par la recherche nanotechnologique, un monde « déréglé » par les ambitions scientifiques. Ysambre se meurt d’un déséquilibre, les êtres qui la composent sont peu à peu « grignotés » par une lèpre mécanique.
Ouvrage presque visionnaire (Ysambre, le Monde-Arbre est paru en 2004 – Il est à noter également que Ysambre apporte en France le steampunk avant l’heure (4)), Ysambre interroge sur les risques d’une dérive technologique et du risque écologique. Mais, s’arrêter là serait réducteur, tant Ysambre va bien au delà de ce thème maintes fois abordé depuis la révolution industrielle.
Telle une allégorie, le diptyque de Mickaël Ivorra et Séverine Pineaux pose les bases d’une réflexion bien plus fondamentale sur la place de l’Homme et son rapport à la Nature. Ysambre met en évidence la nécessité d’un équilibre et l’interdépendance de tous les être vivants. Ce que sème la Femme Graine du titre c’est aussi des idées, une façon différente de voir le monde (…) et la transformation de l’humanité. (5)

C’est sans doutes dans cette richesse et cette originalité que réside l’une des clefs du succès de ces deux magnifiques livres. Succès qui, loin d’être éphémère, s’est insinué durablement, tel un lierre grimpant, dans nos imaginaires depuis près de 15 ans.

J’en veux pour preuve l’intérêt grandissant pour le patronyme Ysambre. Apparu pour la première fois dans les statistiques de l’INSEE en 2007 (un an avant la parution du second volet), le prénom Ysambre a été donné à une vingtaine de petites filles ces dix dernières années. Et même s’il reste un prénom rare, il est porteur d’un imaginaire qui inspire les futures mamans, comme en témoigne cet échange, en 2008, sur le forum du site aufeminin.com entre de futures mamans et Mickaël Ivorra (6).

Mais l’univers d’Ysambre est également une source d’inspiration pour de nombreux artistes qui, à l’instar de cette jeune « faunetographe » qui se fait appeler Ysambre (7), ont fait de la forêt magique, leur univers…

l arbre aux 100.000 rêves, site web de l imaginaire

NOTES & REFERENCES

  1. Interview de Mickaël Ivorra et Séverine Pineaux par le site peuple-féerique.com, à l’occasion de la parution de Ysambre, la Femme Graine en décembre 2008.
  2. La grande encyclopédie des fées de Pierre Dubois, éd. Hoëbeke, 1996.
  3. Ysambre, le Monde-Arbre de Mickaël Ivorra et Séverine Pineaux, éd. Tournon, 2004
  4. Dix ans plus tard, Séverine Pineaux offrira à son public un nouvel ouvrage consacré à son univers de féerie végétale steampunk si particulier : Gothic Faërie.
  5. Interview de Mickaël Ivorra et Séverine Pineaux par le site peuple-féerique.com, à l’occasion de la parution de Ysambre, la Femme Graine en décembre 2008.
  6. Ysambre sur aufeminin.com, 2008.
  7. Interview de Ysambre Fauntography pour les éditions du Faune, 11 juin 2018.

Pour aller plus loin :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Cette entrée a été publiée dans Articles, Aventures, Légendes & Merveilleux, Oeuvres, livres & films, Premiers Pas vers... et taggé , , .
Vous pouvez la mettre en favoris avec ce permalien.